Gradient Méditerrano-Alpin de Placettes forestières (GMAP)

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Questions scientifiques

Le futur des peuplements forestiers, et notamment leur réponse au changement climatique sur le court et le long terme, posent de plus en plus question. Les changements planétaires, en modifiant les conditions environnementales, affectent directement les processus écosystémiques des forêts – comme la productivité, la régénération, la décomposition et le recyclage des nutriments – et les services qui en découlent.

Cependant, ils influent également indirectement sur les écosystèmes forestiers en modifiant la composition des communautés. Or, de tels changements de biodiversité sont susceptibles d’affecter le fonctionnement des écosystèmes, puisque les processus écosystémiques – comme la productivité, la décomposition et le recyclage des nutriments – sont particulièrement sensibles à la diversité en espèces de l’écosystème, comme montré depuis bientôt deux décennies dans de nombreux écosystèmes, aussi bien terrestres que marins.

Pourtant, les conséquences de ces impacts directs et indirects du changement sur le fonctionnement des écosystèmes ne sont quasiment jamais évaluées, en particulier à cause du suivi sur le long terme que cela suppose.

Le but de cette Tâche d’Observation est donc de pérenniser un réseau de suivi de placettes forestières défini et mis en place pour apporter de nouvelles connaissances sur :

  • l’effet de la diversité ligneuse sur le fonctionnement et la stabilité des écosystèmes forestiers, et ce sous différentes conditions climatiques ;
  • et sur le suivi à long terme de ces écosystèmes forestiers en terme de changement de communautés végétales.

Les questions ciblées concernent :

  • le test des effets du mélange et du climat sur divers processus écosystémiques (productivité, décomposition),
  • le test des effets du mélange et du climat sur la composition des peuplements (régénération, structure, diversité herbacée et arbustive),
  • et le suivi sur le long terme de ces différents effets.

Les forêts méditerranéennes et de montagne ont été choisies comme écosystèmes-modèles car celles-ci ont été identifiées comme particulièrement sensibles au changement climatique.

Cette Tâche d’Observation consistera donc en un réseau de placettes forestières distribuées le long de gradients climatiques (gradients latitudinaux nord-sud, gradients altitudinaux, en Provence et dans les Alpes) et différentes conditions de mélanges (en termes de composition de l’étage dominant de la canopée).

Observations

Site

La zone d’étude s’étend de la Provence aux Alpes du Nord et concerne plus particulièrement les massifs montagneux externes, en large majorité sur terrains calcaires.

Un large gradient climatique existe depuis la Sainte Baume et le Luberon, à climat méso-méditerranéen (caractérisé par un été chaud et sec – 1 à 3 mois secs au sens de Gaussen-, un très bon ensoleillement, et des précipitations très irrégulièrement réparties dans l’année), en passant par le Ventoux qui prend un caractère montagnard en altitude, jusqu’aux Alpes externes dans la partie Nord (Vercors, Bauges) avec un climat sous l’influence océanique et des variabilités locales importantes liées à l’orientation des massifs Sud-Ouest / Nord-Est et à l’altitude.

Les placettes forestières (1000 m²) sont organisées par triplets, avec des peuplements purs et mélangés, situées le long de gradients environnementaux (régionaux et altitudinaux), pour explorer comment la productivité en bois, la régénération, et la décomposition des litières sont affectées par la diversité et la structure fonctionnelle des peuplements et les conditions environnementales.

Les placettes sont distribuées le long d’un gradient latitudinal de 6 sites entre Provence et Alpes du Nord, avec du Sud vers le Nord : la Sainte-Baume, le Lubéron, le Ventoux, le Vercors (Lente), et les Bauges.

Chaque site comprend un gradient altitudinal de triplets de placettes (un peuplement mélangé avec le hêtre et une autre essence et les deux peuplements monospécifiques associés, celui de hêtre et de l’autre essence).

Un autre site est associé au gradient (forêt de Méaudre dans le Nord Vercors), mais il est pour l’instant marginal puisqu’il regroupe des peuplements d’Epicéa et de Sapin.

Les massifs sélectionnés présentent une homogénéité de roche-mère (calcaire), et les placettes choisies sont situées en ubacs. Le réseau a donc été pensé pour minimiser l’effet de ces facteurs confondants (roche mère, exposition) afin de mieux montrer l’effet de la variabilité climatique le long du gradient.

Celui-ci inclut actuellement 72 placettes, échantillonnées entre 2013 et 2017, mais son extension est prévue, dépendamment des possibilités. Les placettes supplémentaires pourraient concerner des sites différents (pour augmenter la gamme climatique couverte) et/ou des espèces différentes. En particulier, nous souhaiterions intensifier la densité de placettes en zone méditerranéenne (avec un focus sur le chêne vert, le pin d’Alep et le pin sylvestre).

Mesures

Au sein des placettes sont réalisées des mesures d’observation et de suivi sur le long terme (arbres, arbustes, semis, végétation herbacée, phénologie, climat), et d’expérimentation (décomposition de la litière notamment).

Destinées à être suivies sur le long terme

Mesures abiotiques :

  • Capteurs de températures de l’air et d’humidité de l’air sur chaque triplet (= 21 sur tout le gradient), toutes les deux heures.
  • Capteurs de température du sol et sonde mesurant l’humidité du sol sur 4 sites et 2 triplets par site (= 8), toutes les trois heures.
  • Photos hémisphériques pour estimer la lumière atteignant le sol, tous les deux ans.

Mesures biotiques :

  • Réalisation d’un protocole classique d’inventaire. Au sein des placettes (zone centrale de 10 m de rayon), tous les arbres passant la maille de 7,5 cm de diamètre ont été mesurés (localisation, circonférence à 1,30 m du sol, hauteur. Dans une zone tampon (couronne de 7.5 m à l’extérieur de la placette centrale) seulement les arbres dominants sont localisés et mesurés.
  • Carottage de tous les arbres à cœur à 1,30 m du sol – pour estimation de l’âge, de la densité du bois et de la croissance après analyse dendrométrique des cernes). Les carottages ont été réalisés une seule fois pour le moment (entre 2014 et 2015). Il est prévu de re-carotter les arbres 5 ans après ce carottage initial.
  • Relevés de régénération (inventaires des semis des espèces d’arbres) sur toutes les placettes, une fois par an depuis 2014 (2 semaines de travail).
  • Suivi phénologique avec installation de 16 caméras prenant une photo par jour sur 8 couples de placettes « pur hêtre-mélange », sur 4 sites. Ces caméras ont été installées en 2018.

Non destinées à être suivies sur le long terme

  • Expérimentation de décomposition de litière foliaires, des racines fines et du bois: en place depuis 2015, avec relevés des sachets de litières une à deux fois par an depuis 3 ans. L’expérimentation s’arrête fin 2019 mais pourrait être poursuivie.
  • Mesures de traits foliaires sur les semis : effectuées en 2017, à répéter selon une fréquence à définir (2 ou 3 ans) pour estimer comment ces traits changent avec le changement des conditions climatiques sur les sites.
  • Mesures des traits chimiques et physiques des litières foliaires et des racines fines : effectuées en 2017, à répéter tous les ans pour suivre la variabilité interannuelle.
  • Mesures de la chute des litières (quantité et qualité) en 2018, à discuter si la reconduite est possible (nécessite un investissement humain important pour les récoltes répétitives).
  • Quantification de la croissance racinaire sur deux ans (2018/2019).
  • Production de la biomasse des champignons du sol sur deux ans (2018/2019).
  • Estimation de la disponibilité en nutriments (resinbags) sur deux ans (2018/2019).

Mesures ponctuelles déjà réalisées

Mesures abiotiques :

Mesures réalisés une seule fois par placette : fosse pédologique, composition chimique des premiers horizons et granulométrie du sol (estimation de la réserve utile).

Mesures biotiques :

A l’été 2018, une campagne d’un mois et demi sur tous les sites a permis de réaliser des mesures de traits fonctionnels sur les arbres (grâce à des grimpeurs), selon un sous échantillonnage (5 individus dans les placettes monospécifiques, 10 dans les placettes en mélange). Des feuilles ont également été échantillonnées pour estimer les dégâts liés aux insectes. Enfin des rameaux ont été prélevés afin d’estimer leur croissance annuelle sur les 5 dernières années (en complément des analyses dendrochronologiques).

D’autres relevés ont été réalisés sur les placettes : relevés botaniques, relevés d’abondance et de taille sur les espèces de buissons, de sol (pour analyses de communautés grâce à des techniques de meta-barcoding), échantillonnage de feuilles pour génotypage (pour tous les arbres du gradient, soit 1500 arbres), mesures sur les feuilles des semis liées à la quantification d’un niveau d’abroutissement par les grands herbivores (cervidés).

A noter que les conventions passées avec l’ONF assurent que les placettes ne soient pas impactées par la gestion. Cependant, les liens établis avec le département RDI de l’ONF permettront certainement de pérenniser ces placettes, voire d’obtenir de l’aide technique pour des suivis (par exemple les suivis de régénération). Cette démarche serait renforcée par la labellisation OSU bien entendu.

Données

Données déjà disponibles sur demande :

  • Données d’inventaires des placettes (composition, structure des communautés d’arbres)
  • Données de croissance des arbres (incluant l’analyse dendrométrique) : 15 ans de croissance (1997-2012) pour 1000 arbres [une fois que les travaux en cours seront publiés – thèse de Marion Jourdan 2015-2018].
  • Données de traits fonctionnels : densité du bois (pour 1500 arbres), traits foliaires (en 201), disponibles après publication dans le cadre de la thèse de Soline Martin-Blangy (2017-2020).
  • Données génétiques [une fois que les travaux en cours seront publiés – post-doctorat de Thibaut Capblancq 2016-2018].
  • Données de décomposition et de traits de litières (depuis 2015)

Données de suivi :

  • Données de régénération (inventaires de semis d’arbres réalisés sur les placettes), à pas de temps annuel
  • Données climatiques : températures mensuelles moyennes et humidité relative mensuelles moyennes sur chaque triplet
  • Données de qualités des litières

Données Essentielles de Biodiversité (EBV) :

  • Population genetic differentiation
  • Species distribution
  • Population abundances
  • Population structure by age/size class
  • Phenology
  • Demographic traits
  • Physiological traits
  • Taxonomic diversity
  • Net primary productivity
  • Habitat structure

Pour faciliter la mise à disposition, nous prévoyons le développement d’une base de données d’ici fin 2019 pour l’ensemble des données fournies.

 

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Contact

  • Xavier Morin (Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive)

Collaborations

  • ONF (RDI Méditerrannée et Alpes)
  • LECA (UMR Grenoble)
  • IRSTEA (Grenoble)
  • URFM (INRA Avignon)
  • BIOGECO (INRA Pierroton)
  • SILVA (INRA Champenoux)