Par Olivier Gimenez, directeur de recherche CNRS au CEFE Montpellier
Cet animal fascinant, autrefois commun, avait quasiment disparu. Chassée pour sa fourrure, considérée comme un nuisible, victime de la destruction de son habitat, elle s’est effacée du paysage. Aujourd’hui, contre toute attente, la loutre d’Europe est de retour sur le Lez, en plein cœur de Montpellier.
Son retour n’est pas un hasard. L’arrêt de la chasse dans les années 1970, son classement en espèce protégée dans les années 1980, et l’évolution du peuplement des rivières, a contribué à créer des conditions plus favorables. La loutre, opportuniste et adaptable, a su en tirer profit. Aujourd’hui, elle recolonise progressivement les cours d’eau où elle avait disparu.
Des indices discrets mais précieux
Suivre sa trace n’est pas simple. Animal discret et farouche, elle ne se laisse pas facilement observer. Pourtant, plusieurs indices trahissent sa présence. Les scientifiques traquent ses “épreintes”, nom donné à ses excréments, véritables cartes d’identité laissées au bord de l’eau. Contrairement à d’autres carnivores, elles ne dégagent pas d’odeur désagréable. Certains évoquent une note de thé au jasmin, d’autres un parfum de miel d’acacia. Rien que ça ! En les analysant, on peut identifier son régime alimentaire, composé en majorité de poissons, mais aussi d’écrevisses, de grenouilles et parfois d’oiseaux ou de rongeurs.
Des techniques de suivi de plus en plus poussées
Pour en savoir plus, plusieurs techniques sont utilisées. Les pièges photographiques permettent de capturer des images de l’animal en pleine activité, révélant ses habitudes et son comportement. L’analyse de l’ADN environnemental, technique plus récente, consiste à filtrer l’eau pour y retrouver des fragments biologiques laissés par la loutre, comme des cellules de peau ou des résidus organiques. Ces méthodes complémentaires offrent un aperçu précieux de sa présence sur le territoire.
Un symbole de résilience… encore fragile
Ce retour est une bonne nouvelle pour l’écosystème. Son retour témoigne de la résilience de la nature et de notre capacité à réparer nos erreurs passées. Mais tout n’est pas gagné. Elle reste cependant vulnérable et les menaces sont nombreuses. L’un de ses principaux dangers : la circulation routière. Lorsqu’elle doit contourner un obstacle aquatique, elle peut traverser les routes et être percutée par des véhicules. Pour l’aider, un premier “havre de paix” spécialement conçu pour elle a été inauguré sur le Lez : un refuge où elle peut se reposer et se mettre à l’abri du danger.
Un rôle clé pour la rivière
Protéger la loutre, c’est aussi préserver tout un écosystème. Elle joue un rôle clé dans la régulation des populations de poissons et d’écrevisses. Sa présence rappelle l’importance de conserver nos rivières en bon état. Les efforts de protection engagés ces dernières années portent leurs fruits. La loutre recolonise peu à peu son territoire. Un équilibre se reconstruit, fragile, mais prometteur.
Alors, la prochaine fois que vous vous promenez le long du Lez, ouvrez l’œil. Vous ne verrez peut-être pas la loutre elle-même, mais elle est là, quelque part, laissant derrière elle quelques indices de son retour.
Et si vous deveniez sentinelle du Lez ?
Si le destin de la loutre vous touche et que vous vivez le long du Lez, devenez actrice ou acteur de sa protection !
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Une belle façon de redonner à la rivière… et de mieux la connaître !